Claire Rolain et Julien Tortora forment le duo Dead as the dodo, porté par la compagnie La Générale d’Imaginaire. Dans le cadre de Plaines Santé, la compagnie propose plusieurs de ses projets à La Nouvelle Forge. Claire et Julien sont intervenu.e.s le jeudi 13 octobre au SAMSAH (Service d’Accompagnement Médico-Social pour Adultes Handicapés) situé à Venette, à côté de Compiègne. L’impromptu a rassemblé plusieurs services de La Nouvelle Forge pour un voyage collectif et imaginaire.
« Mettez-vous à l’aise », invitent les deux musiciens. La salle est calme. Les adolescents sont étendus sur des matelas, détendus. « On s’appelle Claire et Julien, on a un groupe de musique à deux et on écrit des chansons sur les animaux en voie de disparition ». Les artistes parlent d’une voix basse et douce, presque en chuchotant.
« Allez, on démarre le voyage ensemble ».
Les premières notes retentissent sur le clavier de Julien et la voix de Claire nous emporte dans la quiétude, comme une berceuse.
« Nous partons dans la plaine, le soleil se lève, il fait très chaud, dans les hautes herbes, le tigre de la Mer Caspienne lève les yeux … tous les animaux de la plaine s’apprêtent à fuir … »
Julien regagne son clavier pendant que Claire entame un chant.
« Fermez les yeux » « Je respire ». « Voilà respirez tranquillement
Les jeunes, allongés sur des tapis, s’apaisent. Un à un, ils trouvent leur position. Allongé les yeux fermés pour Dylan, son ventre fait un va-et-vient paisible au rythme de sa respiration. Il est allongé dans la plaine, à l’abri dans les hautes herbes, ou peut-être loin de là. Qu’importe, il semble bien, assoupi, endormi, rêveur.
Le personnel aussi est confiant. Assises au fonds de la salle, ou bien à côté d’un jeune, elles écoutent le tour de chant avec attention. Certaines ferment les yeux.
« Les animaux de la plaine ont tous déserté car ils ont pris peur. Là-bas tout en haut, il y a la gazelle dama… Elle décide à son tour d’aller se cacher et monte sur la plus haute cime de la montagne. »
La musique est douce, électro, minimaliste. Il n’y a pas de paroles, juste des notes chantées. La voix de Claire nous emmène cette fois en haut de la montagne.
Mathieu suce son pouce. Il a arrêté de gesticuler et de pousser des petits gémissements. Il ferme les yeux. Son voisin Cédric est calme lui aussi, le regard tourné vers les artistes. Il sourit. Walid quant à lui s’est fait une couverture avec son pull, allongé sur un tapis violet, il respire paisiblement, agitant de temps en temps ses pieds, emmitouflés dans des chaussettes rayées bordeaux et grises.
« Maintenant nous sommes au Pôle Nord et l’ours a creusé un trou dans la banquise pour attendre sa proie. »
Adam gesticule, il tourne et se retourne. Il saisit la main de son éducatrice et retrouve son calme alors que le duo entame sa troisième chanson.
Baptiste est au premier rang, allongé sur un gros pouf rouge. Il écoute. Il a les yeux fermés et se bouche les oreilles. Walid se fabrique une longue vue avec ses doigts, puis il se frotte les yeux et tire son pull contre sa poitrine avant de se rendormir. Adam s’est réveillé, il dessine des ronds sur le tapis. Il tend sa main à son éducatrice et retrouve le calme.
« L’orang-outan de Sumatra mange des fourmis. »
Mathieu caresse la main de son éducateur. Dylan n’a toujours pas bougé. On lui devine presque un sourire alors qu’il dort. Walid lève les deux bras au ciel puis se rendort.
Puis, le tour de chant arrive sur sa fin. Il va falloir se réveiller.
Un moment de calme pour apprécier la musique
« Matthieu a aimé. Cédric aussi, beaucoup ! C’était zen, intense, détente », souligne un des éducateurs. A la fin du tour de chant, les jeunes se dirigent vers les musiciens et s’essaient au clavier.
« C’est la preuve qu’ils ont aimé, ils sont curieux, ils veulent interagir avec les instruments et les artistes ».
« C’était bien, j’étais détendu », dit Dylan.
Pour le duo de musicien, c’est une première date dans le cadre de Plaines Santé. « Et une première aussi avec des adolescents », explique Claire. « On avait peur que ce soit trop long mais non : ils ont accroché. On a adapté des chansons de notre album. », explique Julien. « De manière générale, je les voyais d’ici, ils écoutaient à fond. Tu sens que des sons déclenchent des choses dans leurs corps, ils réagissaient avec la musique», renchérit Claire.
Dylan est le dernier à quitter les lieux. « Merci ! Aurevoir ! », répètent-ils plusieurs fois. Il joue une dernière note sur le clavier, la laisse raisonner puis disparaitre. Enfin, à son tour, il salue les musiciens et quitte les yeux.