Cédric Pierre, artiste graphiste et designer a investi l’IME La Tombelle du Groupe Ephèse à Saint-Quentin pour quinze jours en ce début de mois d’avril 2022. Deux semaines pour dessiner, collecter, et rassembler les créations des jeunes dessinateurs dans un ou plusieurs petits objets livres.
« Alors on va travailler un peu différemment qu’hier : je vous ai ramené des livres. Vous allez choisir des images dedans et les dessiner », lance Cédric Pierre au petit groupe de jeunes venu assister à l’atelier du jour. L’ambiance est joviale, un brin cacophonique le temps que la joyeuse bande s’installe. Depuis le début de la semaine, les enfants et l’artiste se donnent rendez-vous tous les après-midis pour une séance de dessin dans le but de coréaliser une petite édition collective. Une pile de feuilles gribouillées est placée en bord de table, fruit de leur collaboration.
Cédric Pierre est graphiste et designer, basé à Paris, et originaire de la région. « J’ai ramené des choses pour qu’ils se sentent à l’aise de produire et de dessiner » explique Cédric. Il s’agit pour le moment d’une mise en bouche, le plus gros du travail se fera la semaine suivante, lorsque l’artiste viendra les accompagner toute la journée. Dans le livre final, il y aura des dessins et des mots : « ce sera par exemple le nom de certaines villes, des noms ressortis de leurs bouches pendant l’atelier ».
Daniel a dessiné un robot, inspiré d’une des esquisses du « livre bleu ». L’ouvrage est une édition que Cédric a réalisée avec son amie et artiste Paquita dans le cadre du dispositif Plaines d’été, un autre programme d’impromptus culturels financés par la DRAC des Hauts-de-France. « On a collecté des dessins et des témoignages sur la notion du « beau ». On se promenait, on posait des questions aux habitants et on enregistrait leurs réponses. On a ensuite assemblé les deux matières pour en faire un livre », explique Cédric entre deux consignes. Ici, à l’IME, Cédric utilise la même démarche. Il a de nouveau revêtu son costume de collecteur : pas d’enregistrement cette fois, « ce sera des images et des dessins essentiellement ».
Mathéo est très concentré. Le voilà qu’il dessine à la fenêtre. Quelques minutes plus tard, il chiffonne sa feuille. « – Je n’ai pas réussi » ! ». « -Tu me montres quand même ? » « – Nan, je vais le refaire en mieux ! ». Sofia chante « sur le pont d’Avignon », pendant qu’Anis trouve une Nième idée : « Je vais dessiner un train en forme de bouteille … ce sera un train bourré ! ». Les autres rient avec lui.
Cédric invite les jeunes à repasser leurs dessins au feutre noir pour faciliter la reproduction dans le livre. Sofia s’est endormie dans le canapé. Kevin fait des acrobaties avec ses bras pour faire rire la galerie. Les autres dessinent encore. « Ils ont insisté pour revenir aujourd’hui, explique une des éducatrices, ils devaient aller en sport, et ils ont préféré dessiner. Le dessin ça leur permet d’exprimer ce qu’ils ressentent, en général ils et elles aiment beaucoup. Mais pour certains, c’est une révélation : Kylian n’est pas quelqu’un qui se met à table et qui dessine habituellement. Or là, il le fait et il est doué en plus ! »
Pour Cédric, l’intérêt est double : rencontrer d’autres publics en dehors du milieu de l’art contemporain parisien et amener de la création et de la réflexion par la création dans les lieux où il est moins commun de le faire. « Ils ont l’habitude de dessiner, précise Cédric, mais là, je leur propose une mise en commun. Pour le moment, il y a une super réception. Il y a quelque chose de très sincère dans leur manière de communiquer leurs émotions. » Le résultat final s’annonce prometteur.