Vendredi 6 décembre 2024, la compagnie de danse Frichti Concept donnait son dernier impromptu de la saison au Centre Hospitalier de Tourcoing (59). Le personnel des services administratifs ainsi que les enfants et parents du centre d’action médico-social précoce (CAMSP) ont eu le plaisir de se faire offrir des petites virgules dansées. Un moment de légèreté.
Des notes de musique se font entendre dans le hall d’entrée de l’administration du Centre Hospitalier de Tourcoing. La mélodie nous guide vers les escaliers qui conduisent aux étages. Quatre à quatre nous montons les marches en carrelage blanc pour arriver nez à nez avec les deux danseurs. La musique est lente, agréable et nostalgique à la fois. Les mouvements sont synchronisés, chorégraphiés, élancés. Brendan Le Delliou et Damien Dreux lancent des sourires avant de tournoyer sur eux-mêmes. Le hall du service est exigu. A chaque jetée, les longs bras de Brendan effleurent le plafond.
« C’était étonnant, confie Charlotte Grzonkowski, au contrôle de gestion. J’entendais de la musique de l’étage d’en dessous et je me demandais ce que c’était ! C’est une très belle récréation ! C’était impressionnant de voir des danseurs qui investissent l’espace comme ça. Quand j’irai déjeuner je verrai le hall différemment désormais ! »
La musique a attiré les salariés qui semblent apprécier cette escapade matinale. A l’étage supérieur, les artistes prennent place dans le couloir étroit des services de la Direction. Quand la musique retentit, des têtes curieuses apparaissent à l’entrée des bureaux. Les yeux sont rivés sur les danseurs et les sourires se pendent aux lèvres. « Vous revenez demain ? » lance une dame amusée. « C’est bien, ça nous change de la visite des docteurs », dit une autre.
« Nous sommes danseurs, et nous sommes là pour tout le monde. Nous voulions vous offrir une minute de danse. Nous sommes passés dans beaucoup de services de l’hôpital et nous voulions aussi venir voir les personnes qui travaillent dans les bureaux », explique Brendan Le Delliou, danseur et chorégraphe. La veille la compagnie a dansé pour les travailleurs de la blanchisserie. « C’était un super moment, se rappelle Brendan, d’abord ils étaient plutôt méfiants et ensuite on a eu un vrai temps d’échange. Ils étaient touchés qu’on vienne jusqu’à eux. Ils sont invisibles alors que leur travail est essentiel pour faire tourner l’hôpital. »
Boum matinale au CAMSP
Geneviève Bouillet, coordinatrice du CAMSP, le centre d’action médico-social précoce, nous accueille de derrière ses lunettes en forme de sapin de Noël. « Je ne les porte pas tous les jours, plaisante-t-elle, c’est qu’aujourd’hui c’est jour de fête. » Deux fois par an, le service organise une journée festive. Les deux danseurs tombent à pic. Les enfants et leurs parents s’amusent dans la grande salle d’attente jonchée de jouets. Les artistes lancent la musique, à peine perceptible dans le joyeux brouhaha. A l’avancée des deux danseurs, un petit garçon court intimidé vers sa maman : « je suis venue voir le pédiatre, explique-t-elle, et c’est la première fois que je vois quelque chose comme ça ici. »
Sur un minuscule fauteuil bleu, une petite fille regarde attentive la chorégraphie. Son frère, Erwan, derrière elle, est tout aussi intrigué. « Encore » entend-t-on à la fin de la première virgule. « Qui veut m’offrir un geste ? » demande Brendan. Erwan accepte. Et Brendan lui offre une danse. C’est ensuite au tour de Soujoud d’offrir une gracieuse pirouette, sous le regard très amusé de sa mère venue avec une amie. Nassim, plus timide, se gratte la tête. Damien se saisit du geste hésitant et propose à son tour une danse. La rencontre se termine par une boum improvisée : personnel, enfants, parents, et jouets en plastique : tout le monde se met à bouger.
Sortir du quotidien
A l’autre bout de la salle d’attente, Géraldine et Céline ont regardé les danseurs avec beaucoup de plaisir. « D’habitude, on attend, on gère les crises des enfants, ce n’est pas toujours facile, confie Géraldine. Là, je me sens détendue ! ». Emmanuelle, une autre maman, fondatrice d’une association pour les parents d’enfants souffrant d’un trouble du spectre autistique (Les Super TSA) a aimé : « Cela leur fait beaucoup de bien, ici, on vit des moments difficiles parfois. L’annonce du diagnostique par exemple est un moment douloureux pour les parents. »
Il est temps de quitter les lieux pour les deux danseurs. C’est la fin de leur aventure Plaines Santé. « On est allé dans différents services, on a rencontré différentes personnes, des patients, des travailleurs de l’administration ou de la blanchisserie, et à chaque fois l’accueil était super. Ce type de dispositif est essentiel. », dit Damien en sortant. « Il y a toujours un petit vide quand ça se termine ».
Propos recueillis par Sidonie Hadoux
Photographies: Gabriela Téllez