Trois questions à Boris Oudelet, directeur du pôle Hébergement et Vie Sociale de l’ AEI, basée à Tergnier

Saison : 2023/2024 - Artistes : Compagnie Cats&snails - Établissements : AEI Tergnier

Clémentine Vanlerberghe, danseuse et chorégraphe, et Fanny Wilhelmine Derrier Mbaye, artiste vidéaste et collagiste interviennent auprès des résidents depuis plusieurs jours. Elles viennent le vendredi, quand les résidents terminent leur semaine de travail. Ensemble, ils réalisent des collages et des vidéos sur le thème des émotions. Cette thématique répond à la pièce Gratia lacrimarum, de la compagnie. « J’aime appeler ça une performance augmentée, raconte Fanny. Nous venons avec la pièce mais nous l’enrichissons avec les productions des résidents ».

Ce jour-là, Florence, Amélie, Thierry et les autres sont heureux de réaliser les collages sur la tristesse et la joie. Entre deux découpes, ils rejoignent Clémentine pour des brèves chorégraphies improvisées…devant la caméra !

Fin septembre, Clémentine et Fanny ont présenté la pièce revisitée devant l’ensemble des résidents.
Vous pouvez la visualiser en cliquant sur ce lien:

Pour commencer, pouvez-vous présenter l’AEI, association pour l’Aide aux Enfants Inadaptés ?

L’association a été fondée par des cheminots en 1964. Aujourd’hui, elle se compose de trois pôles. Le pôle enfance est spécialisé pour les enfants souffrant de différents troubles, de handicaps, intellectuels notamment. Ensuite, il y a un pôle travail protégé, anciennement CAT, aujourd’hui ESAT, qui accueille 223 travailleurs handicapés. Et le pôle que je dirige, le pôle hébergement et vie sociale, dispose de deux structures d’hébergement, ouvertes toute l’année, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et d’un service d’accompagnement à la vie sociale, qui accompagne à peu près à l’année entre 80 et 90 personnes qui, elles, sont en situation de grande autonomie et vivent dans leur domicile. Des professionnels de type éducateurs spécialisés les accompagnent selon les besoins et les demandes. 

C’est la première fois que vous participez à Plaines Santé, qu’est-ce qui vous a intéressé dans ce dispositif ?

Alors, deux choses. Il y a bien sûr le côté ouverture sur le monde de la culture. Au quotidien, nous travaillons beaucoup avec les centres culturels locaux, les centres sociaux, etc. On essaie que nos établissements soient ouverts sur l’extérieur et que nos résidents puissent accéder à la culture.

Deuxièmement, il y a un paramètre qui est important à souligner : c’est la question de l’argent. Aujourd’hui, nous sommes financés par le département. Ils prennent en charge les salaires, les frais de gestion, les charges courantes. En revanche, tout ce qui traite à la culture, c’est plus compliqué : c’est à nous d’aller chercher différents modes de subvention et de financement. Le dossier pour candidater à Plaines Santé était relativement léger à monter. Cela nous a permis de postuler en un quart d’heure, puis d’être sélectionnés avec une subvention à hauteur de 15 000 euros.  Même si elle est directement distribuée aux artistes, cela nous permet d’avoir 15 demi-journées d’impromptus sans à avoir à débourser un centime. J’insiste mais sans ces dispositifs, on ne pourrait pas offrir à nos résidents ce type de prestations. 

Boris Oudelet

Qu’est-ce qui est intéressant dans le fait que les artistes viennent dans vos murs ? 

Les politiques publiques nous enjoignent à faire ce qu’on appelle de l’inclusion. C’est-à-dire, à encourager nos résidents à sortir hors les murs. Ce qu’on fait tous depuis longtemps. De plus, il y a une liberté de circulation totale, puisque ce sont des adultes. Même s’ils sont en situation de handicap, ils ont les mêmes droits que vous et moi. Sortir dans la cité, c’est important. Et nous en faisons fait la promotion tous les jours. 

En revanche, je trouve ça tout aussi intéressant que ce soit l’extérieur qui vienne à nous pour découvrir comment les gens vivent ici. Quel est le quotidien quand on présente un handicap intellectuel et qu’on vit en établissement ? On s’aperçoit vite que c’est de l’habitat collectif, comme on en trouve dans d’autres quartiers de la ville. Cela permet de combattre certaines représentations ou stigmatisations. Nous sommes très heureux d’accueillir chez nous des personnes de l’extérieur.

Plaines Santé présente aussi cet intérêt-là : il y a des artistes qui vont désormais se soucier de comment vivent les gens, dans quelles conditions, et qu’est-ce qu’y est fait en structure d’hébergement pour adultes.