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Trouver refuge … avec le Collectif Errances

By | 2022/2023

Le Collectif Errances a posé ses valises le temps d’une semaine à la clinique Lautréamont à Loos (59) à côté de Lille dans le cadre du dispositif Plaines Santé. Lectures musicales et ateliers d’écritures créatives ont rythmé la semaine, jusqu’au vendredi où le collectif a présenté sa dernière création, Peupl.é.e.s, une « lecture musique sur puzzle-paysage ».

« Cela fait longtemps que je n’ai pas joué aussi tôt », lance Mélody Blocquel, metteuse en scène et interprète, fondatrice du collectif Errances. Assise sur le puzzle installé au milieu de la pièce, Mélody s’étire. Sarah Baraka, interprète, et Thomas Jankowski, musicien, patientent également, l’air détendu et concentré. Au fond de la salle, Madeline Wood, la scénographe est assise. C’est elle qui a réalisé le puzzle géant sur lequel vont déambuler les artistes. Les spectateurs et spectatrices seront invitées à s’asseoir sur les parties recouvertes de moquette, au sein même de l’installation. C’est une invitation à la balade, une immersion dans un paysage imaginaire, ou réel, au gré des envies et de la réception de chacun et chacune.

Les jours précédents, les artistes ont proposé des ateliers d’écriture autour de la thématique. « C’était très agréable », explique Patricia, une des participantes. Ecoutez-là :

Patricia explique ce qu’elle a fait durant les ateliers d’écriture 

« Ce que j’aime, ce sont les débuts de marche … »

 Il est 10h passées, la porte de la salle s’ouvre. Les trois artistes prennent place au milieu du puzzle pendant que les jeunes spectateurs et spectatrices s’installent tout autour. Thomas gratte les premières notes sur sa guitare. Mélody est assise, Sarah allongée, ses yeux ouverts regardent le plafond. La balade peut commencer, rythmée par les mots du texte écrit par Mélody. Les trois interprètes nous emmènent dans un lieu tenu secret, un chemin de bord de mer bordé de tamaris, avec vue sur une île. Libre à nous d’imaginer notre propre lieu refuge. 

Patricia, spectatrice, nous partage ses ressentis après le spectacle

 

L’auditoire écoute, les visages sont détendus. Le puzzle retourné laisse apparaître des couleurs et des formes abstraites, douces et poétiques. Les personnes présentes ont accepté l’invitation : chacun et chacune semble revenir d’une promenade intérieure.

INTERVIEWS CROISÉES : LES ARTISTES, Mélody Blocquel, Sarah Baraka, Thomas Jankowski

Quels sont vos ressentis juste après la performance ? Comment avez-vous vécu le moment ?

Mélody : Je dirais que cela m’a aidé de voir des têtes connues. Nous avions rencontré ces personnes durant la semaine : nous avons partagé un ou plusieurs ateliers, nous les avons croisés dans les couloirs, on a partagé un repas. Je pense que cela a porté le spectacle. 

Sarah : Je suis d’accord. Voir des visages connus ; avoir traversé des choses avec certaines personnes, cela m’a aidé aussi. C’était comme avoir déjà un endroit commun. J’ai senti néanmoins que je mettais beaucoup d’énergie pour provoquer des réactions (rires). 

Mélody : Le spectacle était prévu à la fin d’une semaine d’ateliers et de rencontres avec les patients et patientes. Lundi j’ai joué un autre spectacle, puis nous avons fait une lecture musicale de Peuplé.e.s. À ce moment-là, on ne les connaissait pas. J’ai senti une différence. Ensuite, lors des ateliers, nous donnions et nous recevions aussi beaucoup. C’était un partage. Alors qu’aujourd’hui, c’était nous qui donnions quelque chose. Mais c’était très émouvant de leur partager ce qu’on leur a raconté cette semaine.

Sarah : Il y avait quelque chose de familier. Je me sentais plus à l’aise en fin de semaine. Lundi, on débarquait, on arrivait de l’extérieur, et on devait prendre place. Là, nous étions davantage posés.

Était-ce la première fois que le Collectif Errances intervenait en milieu hospitalier ?

Mélody : C’est tout récent. On a eu un premier projet il y a 2 semaines à l’EPSM de l’agglomération lilloise, à côté de Lille. Mais un projet comme celui-ci avec autant de rencontres, c’était la première fois, pour moi, et pour le Collectif Errances. 

Qu’est-ce que vous êtes venus chercher dans le cadre du dispositif Plaines Santé ?

Mélody : Le projet Peuplé.e.s a été pensé pour les lieux non dédiés au spectacle vivant. L’idée est d’aller vers les publics, de parler d’un lieu dans un autre lieu et pas dans une boîte noire de salle de spectacle. Dans le cadre de Plaines Santé, nous ne voulions pas uniquement proposer un spectacle mais nous souhaitions y aller petit à petit : partager du texte, de la musique, rendre accessible l’écriture poétique à travers les ateliers. Je voulais que les jeunes aillent chercher dans leurs imaginaires. Nous nous sommes vite rendus compte que ces jeunes avaient l’habitude de passer par l’écriture pour s’exprimer. Il n’y avait pas de blocages sur l’écrit alors nous sommes allés jusqu’au travail de l’oralité. Nous voulions croiser les voix, créer quelque chose de commun.

Thomas : Personnellement, je viens chercher du partage avant tout. Cela peut passer par l’énergie, de la musique, de l’attention. J’ai ressenti beaucoup d’attention cette semaine, une belle attention. 

Est-ce que le spectacle a été écrit avec l’objectif de parler à des jeunes hospitalisés, en situation de soin ?

Mélody : Non. J’avais à l’origine l’envie de partager mon expérience, d’être dans un récit optimiste et vivant. Mais il est vrai que plus on avançait dans la création et plus on se disait que cela faisait vraiment sens de venir ici. Et puis en étant ici, on s’est rendu compte que c’était évident, que ça faisait écho aux jeunes. On en a parlé avec certains mercredi, il y a eu beaucoup de textes de leur part sur des souvenirs de vacances. Pour eux, l’enfance n’est pas très loin : le lieu de vacances est souvent un endroit agréable, qui leur fait du bien. 

INTERVIEWS CROISEES : LES SOIGNANTES, Anne et Emilia, infirmières en hôpital de jour

Pouvez-vous présenter brièvement la structure ?

Emilia : On accueille des jeunes de 13 à 25 ans quelques jours dans la semaine en hôpital de jour. Durant les journées où les jeunes sont là, on leur propose des ateliers animés par des intervenants professionnels. 

Quels sont vos ressentis juste après avoir assisté à la représentation du Collectif Errances ?

Anne : Une vraie découverte pour moi ! Je ne savais pas ce qu’était un spectacle vivant. J’étais très étonnée par l’aspect immersif. Il m’a fallu un temps d’adaptation et après j’ai lâché prise et je me suis laissée aller. On a l’habitude des salles de spectacle où on est dans le noir, or là on était autant dans la lumière que les artistes. Il et elles nous ont inclus dans leur spectacle et il m’a fallu accepter de prendre place… de trouver ma place.

Emilia : Pour ma part j’ai fait plusieurs ateliers avec elles durant la semaine et j’ai compris le lien entre les activités d’écriture et le spectacle. Quand j’ai entendu les phrases qu’on avait utilisées dans les ateliers, j’ai compris. C’était intéressant d’être inclus dans le spectacle.

D’un point de vue de soignante, en quoi ce genre de dispositifs est intéressant pour les jeunes que vous accueillez ?

Emilia : La découverte de l’inconnu, et qu’ils puissent profiter de nouvelles expériences !

Anne : Cela les invite à s’ouvrir, à s’éveiller, à se laisser surprendre. On a eu des retours très positifs.

Est-ce que c’est la première fois que la structure accueille des artistes sur une semaine ?

Emilia : Il y a quelques années, nous avions accueilli une compagnie de clowns sur une semaine également.

Vous avez assisté au spectacle comme les patients, est-ce que le fait d’être tous et toutes spectatrices et spectateurs, à égalité entre patients et soignants est quelque chose de nouveau pour vous ?

Anne : Lors des activités, les patients et les soignants sont toujours positionnés de la même manière. On vit l’expérience avec eux, avec elles, à égalité. Ce n’est pas nouveau. C’était naturel. 

Dans Peuplé.e.s, il y a plein de mots issus du champ lexical du soin : « se réparer », « renaître », « respirer », « souffler ». Avez-vous pensé que le texte était plutôt approprié au public ?

Oui, les retours sont positifs. Les jeunes nous ont dit qu’ils auraient bien aimé connaître le thème au départ, mais finalement, au fur et à mesure du spectacle, ils ont constitué leur propre monde. Et c’est ce qui s’est produit sur moi aujourd’hui : j’ai lâché prise et cela m’a apaisé. Et je me demande si cela leur a fait la même chose, un apaisement vis-à-vis de leurs problématiques.

Emilia : Oui, j’ai vu des visages qui se sont détendus au fur et à mesure du spectacle. Je pense que la proposition les a détendus. Je pense que l’on pourra s’inspirer de cette expérience pour proposer de nouvelles choses dans le futur à nos patients. 

Le temps des cerises à l’EHPAD Le Château d’Antilly

By | 2022/2023

Lundi 19 juin 2023, la compagnie audomaroise Les Lunaisiens se produisait pour la troisième fois à l’EHPAD du Château à Antilly (02) dans le cadre de ses impromptus pour Plaines Santé. 

La bâtisse en impose dès le portail d’entrée. L’EHPAD Le Château porte bien son nom, situé à Antilly, l’établissement accueille 80 résidents et résidentes, une équipe de 40 soignants et deux chiens. À l’étage, sur les tables de l’espace cuisine, deux habitants parcourent un album photo : « Vous connaissez la Dordogne ? », demande Michel en désignant les images proprement plastifiées dans son album. Il s’agit de photographies d’un château, encore un …

Le ton est donné. Une heure plus tard, Arnaud Marzorati et Mélanie Flahaut de la compagnie Les Lunaisiens entament une chanson qui chante les louanges d’Henri IV. Ce jour-là, les deux artistes proposent la (re)découverte d’un répertoire ancien, baroque, avec des chants et musiques de la Renaissance. A chaque impromptu proposé, c’est le même rituel : Arnaud Marzorati, directeur artistique de la compagnie et chanteur, vient accompagné d’un musicien ou d’une musicienne qui présente un instrument à l’auditoire, qui plus est un instrument peu connu… Mélanie Flahaut est venue avec son basson, un instrument de la famille des hautbois. « Un tuyau de 2 mètres où l’on souffle dedans à travers une hanche », explique l’instrumentiste. Après quelques mots sur l’histoire de l’instrument, la musicienne déambule dans la salle en jouant une mélodie.

Le basson raisonne dans la salle polyvalente de l’établissement. Les spectateurs et spectatrices écoutent attentivement. Certains ferment les yeux pour mieux écouter, d’autres dorment. Une personne agite ses bras doucement au-dessus de ses genoux au rythme de la mélodie. Il s’appelle Raymond : « Moi je suis un fan de musique. Le soir, je regarde l’émission de Nagui à la télé et je danse. C’est vrai que je préfère les musiques un peu plus costauds, le rock par exemple, mais il y a plein de musiques, comme le classique ou ce qu’on vient d’écouter, qu’on a mis de côté et ça fait du bien de les réécouter. C’est magnifique ! Je me suis régalé. Je suis heureux. »

Paulette, assise à quelques chaises de lui, est musicienne également. Elle l’a fait savoir dès la première visite des artistes de la compagnie. Quand Mélanie sort son instrument, elle ne laisse pas le temps aux autres spectateurs de deviner : « C’est un basson ! », répond-t-elle. 

« À 5 ans, on m’a fait apprendre le violon, se remémore-t-elle à la fin de la performance. Et chemin faisant, ça m’a plus et j’en ai fait jusqu’à l’âge de 25 ans. Mes violons m’ont suivi partout : je les ai amenés jusqu’ici dans ma chambre. Quand j’entends du violon, j’ai mon petit cœur qui se serre. » À chaque visite son instrument : viole de gambe, basson, accordéon, violon, au total une dizaine de musiciens et musiciennes viendront visiter les habitants de l’EHPAD du Château. « Et toujours la voix, précise Arnaud, car je ne suis que chanteur ! ». Pour l’artiste, chaque instrument donne l’occasion de présenter un répertoire différent : « des chansons qu’ils connaissent et d’autres qu’ils connaissent moins ». Cet après-midi-là, Arnaud et Mélanie entament Le Temps des Cerises. Dans la salle, des voix s’élèvent pour les accompagner. Certains yeux se mouillent aussi, la chanson réveille des souvenirs, ou la voix d’un être cher disparu. C’est cela aussi la musique : des décibels d’émotion, des gammes de joie et quelques notes de tristesse. 

Bouquet de chansons, de fleurs et de rencontres

By | 2022/2023

Carreaux Patrouille à l’unité de dialyse de Proville

 

Les impromptus se poursuivent, et c’est à Santélys, que la cie La Rustine intervient avec une proposition entre illustration, musique et poésie. Le 16 mai, Chloé et Romain Smagghe proposent aux patients et patientes et aux professionnels la création du bouquet de l’unité.

 

Retours en images et en sons avec le diaporama sonore réalisé par Gabriela Téllez et Sidonie Hadoux.

Construire « l’espoir avec des rêves et des désirs » à Raimbeaucourt

By | 2022/2023

Vendredi 24 mars 2023, Neebiic et Camille Gallard ont investi le centre Hélène Borel à Raimbeaucourt pour une journée d’impromptus artistiques. Les résidents du lieu ont assisté heureux et heureuses aux déambulations musicales de Neebiic, et au ciné-concert On a roulé sur la lune, avec le film documentaire de Camille Gallard, mis en musique par Neebiic.

« Aujourd’hui, ça va être une grosse journée ! », lance Mathieu, le référent culture de l’établissement. Assisté de Mehdi, bénévole et résident du foyer situé à Arleux, Mathieu accompagne les artistes le temps de leur journée d’intervention. La matinée est déjà bien entamée, et Neebiic (Ludivine Vandenbroucke et Adrien Fontaine) sont en train d’installer leur attirail pour le ciné-concert : claviers, fils électriques, pédales. Dans le coin à droite de l’entrée, l’écran est prêt à recevoir les images du film de Camille Gallard. Ce sera pour cet après-midi. Pour le moment, place à une déambulation musicale dans plusieurs services du centre.

Il est bientôt 11h00. Ludivine et Adrien enfilent les bretelles de leur accordéon. La bruine a cessé. Les artistes en profitent pour quitter la salle polyvalente : direction l’accueil de jour à quelques pas de là. On passe un pont au-dessus d’une petite rivière. Les arbres bourgeonnent très timidement encore en cette fin d’hiver, mais les quelques rayons de soleil qui passent à travers les nuées dessinent l’esquisse printanière du lieu.

Déambulations

Dans les couloirs de l’accueil de jour, l’ambiance est calme. Une partie des résidents sont en atelier de cuisine dans un autre bâtiment. Cinq personnes rejoignent les artistes. On s’assoit autour d’une table. Neebiic prend place également. Le temps d’un interlude, Camille entame la lecture d’un de ces textes sur le cinéma : «[…] Je préfère de loin le cinéma qui se présente devant nous avec l’honnêteté de fabriquer des images […] ». Le public écoute attentif. La lecture donne des envies à Francky, résident du lieu, « compositeur, interprète, slameur à plein temps ». Il sort de son sac à dos un carnet où il écrit ses textes. D’une voix assurée, il succède à Camille pour une seconde lecture : « Il est 10h20 et je viens de me lever. Soudain, je me mets à rêver […] ». La petite audience applaudit les deux lecteur et lectrice. Neebiic entame un dernier morceau avant de rejoindre l’aile d’un autre bâtiment… l’allée des coquelicots.

Dans cette allée, les résidentes sont alitées. Leur handicap les empêche de se mouvoir. À l’entrée de la chambre de Marianne, on peut lire sur la porte « Tok Tok Tok Rock ». On « toque », le visage de Marianne s’illumine d’un sourire. Elle arrête sa partie de solitaire pour profiter pleinement du cadeau que Neebiic est en train de lui offrir : la chanson Que je t’aime de Johnny Hallyday, revisitée à l’accordéon. Marianne chantonne en balançant la tête. Marianne est une grande fan de Johnny. Sa chambre est décorée de plusieurs posters et figurines du chanteur. Après le passage des musiciens, elle raconte qu’elle l’a vu trois fois en concerts : à Cambrai, à Lille, et à Paris !

« Rouler sur la lune »

Après le déjeuner, Mathieu ferme les rideaux pour la projection. Il est bientôt 14h00, et les résidents viennent de prendre place dans la salle polyvalente, face à l’écran. Ludivine et Adrien s’installent derrières leurs claviers.

« Bonjour à tous ou rebonjour. Je suis Camille Gallard, la réalisatrice du film que l’on va voir après. Et je suis accompagnée de Neebiic, les musiciens Ludivine Vandenbroucke et Adrien Fontaine. Je vais vous lire un petit texte pour ouvrir le bal de mes films. » L’audience est calme et attentive. « J’ai réalisé ce film lors d’une résidence à l’IEM St Exupéry à Amiens en 2019. […] Ma caméra me permet d’être en apesanteur le temps d’un tournage. Le film ne m’appartient plus, il est à vous, et il est vivant avec les musiciens aujourd’hui. »

La musique commence. Silence dans la salle. Les yeux sont rivés vers l’écran. Les 18 spectateurs et spectatrices réagissent à plusieurs reprises, notamment quand le jeune Dylan, 14 ans, déclame à la caméra tout l’amour qu’il ressent pour son amoureuse.

« C’était bien réalisé, les enfants sont vraiment émouvants. C’était bien fait. », réagit une résidente à la fin du film. « Moi, cela me rappelle quand j’étais jeune avec mon copain de l’époque. Mon père aller me conduire chez lui. Nous vivions la même chose que ces enfants », raconte une autre visiblement émue. Les échanges se poursuivent pendant un bon moment après le film. Pari réussi !

Interviews croisées 

Neebiic / Camille Gallard

Quels sont vos ressentis juste après la performance ?

Ludivine : J’ai trouvé ça assez émouvant. Cela faisait longtemps que l’on n’avait pas joué le ciné-concert donc c’était déjà un plaisir de le refaire ! Et puis, d’entendre les réactions des gens attendris : c’était mignon. Et puis, nous on a bien joué avec Adrien donc on est content de la performance !

Camille : Moi aussi, je suis émue d’avoir ces retours positifs, de voir que le film touche des personnes en dehors de l’endroit où j’ai filmé. Il y a des gens qui se sont identifiés aux personnes du film.

Ludivine : Et cela a suscité une réflexion sur l’enfance !

Camille : Oui, et aussi sur la nécessité de montrer des personnes en situation de handicap. Cela leur a fait du bien et ça m’a particulièrement touché car c’est le but de mon travail

Neebiic, c’est la première fois que vous intervenez en milieu hospitalier. Qu’est-ce qui vous intéresse dans la démarche et qu’êtes-vous venus chercher ?

Ludivine : C’est parti de ce film justement [On a roulé sur la lune, 2020, de Camille Gaillard]. La forme ciné-concert était le point départ pour Plaines Santé. Ensuite, on a travaillé et on a développé ce moment acoustique et déambulatoire que l’on a proposé ce matin. On s’est dit que ce serait opportun de jouer dans les chambres des résidents qui ne peuvent pas bouger.

Adrien : Je ne sais pas trop ce que l’on vient chercher. C’est ma première expérience en milieu hospitalier, alors j’arrive sans apriori, et sans savoir vraiment si ce que l’on montre est pertinent. On se fait tout petit. On vient avec des propositions projetées, toute faites, et très vite, on sent qu’il faut les mettre au niveau des énergies de chacun chacune. C’est donc aussi artistiquement intéressant au-delà du fait que c’est une expérience très touchante. Et il y a cette interrogation permanente : est-ce que c’est pertinent ? On va vers des gens qui n’ont pas forcément demandé quelque chose.

Ludivine : On partage tous les trois cette crainte là en fait ! C’est une occasion parfaite de tester ces rencontres mais effectivement les personnes n’ont pas vraiment demandé à ce que l’on soit là. On impose quelque chose mais on essaye de le faire en faisant attention aux énergies, aux envies des gens.

Camille : On arrive et eux n’ont pas choisi. Je me demande toujours : est-ce qu’on a notre place ? C’est peut-être pour cela qu’on attache autant d’importance aux retours. S’ils sont bons, cela nous permet de nous rassurer et de nous dire : ah si, on a bien fait notre travail !

Justement, comment avez-vous travaillé pour préparer ces impromptus ? Est-ce que vous réadaptez vos propositions au fur et à mesure ?

Ludivine : Aujourd’hui, c’était un peu la découverte. C’était la première fois que l’on jouait notre proposition déambulatoire par exemple. On a essayé des choses. Vivement les prochaines ! Cela donne envie de revenir pour tenter d’autres trucs et revoir les gens qu’on a rencontré.

Adrien : On se demandait vraiment comment les gens allaient accueillir cela. Et en fait, il s’est passé de très beaux moments !

Ludivine : Oui, j’ai beaucoup aimé par exemple le moment dans la chambre de Marianne quand on a joué Johnny !

Camille : Cela me fait penser à la question de vos masques [Le duo Neebiic est normalement masqué sur scène avec des visages de singes] : est-ce qu’on les met ? est-ce qu’on ne les met pas ? Est-ce que ça fait peur ? Et là en fait on a eu des supers retours sur vos masques donc on s’est dit : ah bah si en fait il faut les mettre !

Camille, toi ce n’est pas la 1ère fois que tu interviens en milieu hospitalier. Qu’est-ce que tu aimes dans cette démarche ?

Camille : Ce n’est pas la première fois, mais ici c’est différent. Avec Plaines Santé, c’est une forme diffusion. D’habitude, je créé avec les résidents. Je travaille avec eux et ils se reconnaissent dans les films. Là je viens avec un film que j’ai fait ailleurs et que je montre donc c’est une autre démarche. Je suis toujours très contente de ramener ici de la diffusion et de la culture, mais ce n’est pas sans questionnement et sans peur.

Mehdi

Peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Mehdi, résident à Arleux, bénévole à Raimbeaucourt. J’ai 36 ans

Comment es-tu devenu bénévole pour le centre Hélène Borel ?

J’étais à l’accueil de jour où il nous est proposé un certain nombre d’activité qui m’ont permis de m’ouvrir. Maintenant, j’ai envie de faire autre chose. J’ai toujours été ouvert aux autres, mais je n’étais pas ouvert au monde extérieur. Quand j’ai commencé à prendre le bus par exemple, je flippais beaucoup. T’es tout seul dans le bus, si le chauffeur ne s’arrête pas, tu te retrouves loin et c’est un problème. Mais aujourd’hui, je n’ai plus peur et j’ai eu envie de bouger, d’être actif.

Pour ta mission de bénévole, tu es amené à te déplacer, notamment pour aller de ton lieu de vie à Arleux, jusqu’au centre de Raimbeaucourt (25km) Quelles difficultés rencontres-tu ?

Pour venir à Raimbeaucourt, il me faut prendre 2 bus. Il faut que je parte à 7h51 d’Arleux et j’arrive à 9h37 à Raimbeaucourt. La difficulté c’est qu’il faut prévenir la société de bus avant de partir sinon les chauffeurs parfois refusent de nous prendre. Mais les choses s’améliorent : les bus sont désormais gratuits et adaptés ! Si je veux aller plus vite, je dois faire appel à un taxi privé, cela coute 60 euros la journée.  Faciliter la mobilité des personnes en situation de handicap reste un chantier. Tout est plus cher pour nous. Mais moi j’ai la bougeotte dans le sang, alors je prends les transports et je m’assure qu’on respecte mes droits !

Quelles sont tes missions en tant que bénévole ?

S’il y a un évènement, Mathieu m’appelle. Si je suis disponible, je viens. Mais il se peut que je ne sois pas disponible, car j’ai aussi des séances de rééducation à l’extérieur. Si je suis disponible, j’aide à la logistique comme par exemple recouvrir les fenêtres de papier pour créer une salle de projection pour les films de Camille ! C’est ce qui m’attend dimanche à Arleux par exemple.

Qu’as-tu pensé du film de Camille ?

J’ai pensé que le film était pas mal. Il dit les choses réelles. Même si ce sont des enfants qui le disent, ils racontent ce que l’on vit. On ne serait pas handicapé aujourd’hui, on serait plus visible.

Dans le film, on parle du regard des autres sur les personnes en situation de handicap. Est-ce que cette question du regard t’a fait écho ?

Le regard des autres, je m’en fou ! On m’accepte comme je suis. Si on ne m’accepte pas, les personnes dégagent.

Les artistes confiaient qu’ils avaient peur de s’imposer, de proposer des activités artistiques que vous n’avez pas demandé. En tant que résident et ancien usager de l’accueil de jour, que penses-tu des activités proposées ?

J’ai arrêté l’accueil de jour car je n’y trouvais plus mon compte. On faisait beaucoup d’activités et ce n’était plus ce que j’avais besoin. Mais c’est personnel. On ne peut pas dire que l’accueil de jour est une mauvaise chose. Les personnes qui viennent n’ont souvent rien d’autre à faire. S’ils n’ont pas cette chance, ils restent chez eux, parfois seuls, à ne rien faire. C’est très important que la culture vienne à eux. Heureusement, que j’ai trouvé le centre Hélène Borel à un moment dans ma vie car cela m’a permis de m’ouvrir. J’étais plus renfermé avant ; et cela m’a permis de prendre mon indépendance. Aujourd’hui, je n’ai plus peur de bouger d’une ville à l’autre. Mais certaines personnes, en raison de leur handicap, ne peuvent pas se déplacer. Et c’est triste : toute personne doit pouvoir se déplacer ! Bouger, c’est s’octroyer un moment d’évasion.

Expériences musicales à l’APEI de Denain

By | 2022/2023

Plaines Santé repart pour une nouvelle édition : et c’est l’APEI – Papillons Blancs de Denain, qui a accueilli les premiers impromptus de la saison avec le collectif Muzzix. L’APEI de Denain se compose d’une multitude de services et deux sont concernés par les impromptus artistiques : le SAJ et le SAT qui accueillent des adultes en situation de handicap intellectuel. Le 10 mars 2023, le Cruz/Beaumont duo (guitares électriques) a proposé un concert-rencontre d’une heure environ afin de faire découvrir la musique expérimentale aux usagers de l’établissement.

Retours en images et en sons avec le diaporama sonore réalisé par Gabriela Téllez et Sidonie Hadoux.

Le Bureau de Postes des Poètes Patients…

By | 2021/2022

Ce bureau éphémère s’installe dans les espaces d’accueil des services, les halls, les salles d’attente ou tout autre lieux à imaginer. Martin Granger invite les participantes et participants à écrire de courts poèmes qui sont ensuite mis sous pli, éventuellement personnalisés et expédiés par voie postale à des destinataires inconnus, familles, amis, en dehors de l’hôpital ou dans d’autres services de l’EPSM.

La proposition est très souple et permet d’organiser des séances de 10 à 45 minutes pour des groupes de 1 à 15 personnes.

Les techniques d’écriture proposées (dont une large part est inspirée des propositions de l’Ouvroir de Littérature Potentielle : OuLiPo) sont éprouvées et permettent à des publics très divers, y compris ne sachant ou ne pouvant pas lire et/ou écrire, de produire des textes de qualité. Les poèmes peuvent  puiser leur inspiration dans des sources infinies : le nom de la rue du destinataire ; des textes sur le thème de la liaison épistolaire choisis et proposés par l’intervenant ; l’environnement immédiat (locaux, écriteaux, règlements, affichage etc.) ; les récits des participantes et participants…

Parallèlement à l’écriture de textes, les participantes et participants sont conviés à éventuellement réaliser des enveloppes originales sous la houlette de Delphine Sekulak et Louise Bronx, artistes plasticiennes. Toutes deux ont leurs techniques de prédilection et emploient avec les participants des procédés simples et rapides tels que l’estampe, le collage, le dessin, le tampon, etc.

Les interventions se sont déroulées au mois d’octobre 2022.