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La fée Linotte ouvre des portes au Centre Hospitalier de Saint-Quentin

By | 2022/2023

Mardi 3 octobre 2023, la comédienne-marionnettiste Fanchon Guillevic, compagnonne du Tas de Sable – Ches Panses Vertes, Centre National de la Marionnette, était au Centre Hospitalier de Saint-Quentin pour présenter l’impromptu A tire d’ailes pour les jeunes patients du service de pédiatrie.

Barbara entre dans la pièce où Fanchon se maquille. « Tu es prête ? demande gentiment la monitrice-éducatrice à sa complice du jour. Je vais voir si Chloé est disponible. » Chloé est une des adolescentes hospitalisées dans le service pédiatrique de l’hôpital. Sa maman est là en ce début d’après-midi, et c’est dans sa chambre que Fanchon, artiste marionnettiste, va jouer la première représentation de l’après-midi.

Pendant que Barbara prépare le terrain, Fanchon termine de recouvrir son visage d’un jaune métallisé. Face à l’évier, elle nous raconte comment se sont passées les représentations précédentes dans les autres services du centre hospitalier. Fanchon en est à sa troisième semaine d’intervention. Elle a joué pour différents services : les résidentes de deux EPHAD, les patients du service d’Oncologie-Hématologie et les enfants hospitalisés du service de pédiatrie. La petite forme scénique qu’elle présente a été spécialement pensée pour être jouée en milieu de soin, en chambre, au chevet des personnes empêchées.

Ce jour-là, en pédiatrie, Fanchon se présente dans 4 chambres. « Elle a du mérite !, commente Barbara Odelot, monitrice-éducatrice. Le fait de s’adapter à différents services n’est pas facile. Les personnes sont différentes. Elles n’ont pas forcément les mêmes attentes, explique-t-elle. Il faut trouver sa place quand on intervient. On entre dans une dynamique particulière à chaque fois. En pédiatrie, il faut être attentive au moindre regard, réflexion, parole. »

Pour Fanchon : « ce qui m’aide c’est d’être solide dans ma proposition, explique l’artiste, je sais que j’ai créé ce spectacle pour les adultes, en milieu de soin. Et je savais qu’il était facilement adaptable pour les ados. L’inverse aurait été plus compliqué. »

Un spectacle en toute intimité

Barbara vient d’aller demander à Chloé, de regagner sa chambre. Fanchon est prête. Elle sort de la salle d’atelier en poussant son castelet. Elle allume la musique et se dirige tout doucement dans le couloir où se trouve la chambre de Chloé. Assises sur le lit du fond, contre la fenêtre, l’adolescente et sa maman attendent le début de la représentation dans le noir. Fanchon entre avec ses sept portes. Elle referme délicatement celle de la chambre derrière elle. Le spectacle se fait en toute intimité, rien que pour Chloé et sa maman.

Barbara, ravie, occupe les autres adolescents autour d’un jeu de société. Elle va bientôt fermer les volets de la deuxième chambre où Fanchon se produira juste après.

« Nous, le personnel de l’hôpital, nous avons un regard professionnel avec des objectifs bien déterminés en fonction des patients. Les artistes quant à eux, apportent un regard neuf. C’est une autre dimension, explique l’éducatrice. Nous, on reste dans le côté médical : quand je les prends en ateliers, même si on est dans une pièce en dehors du service, l’objectif final c’est que l’enfant puisse adhérer aux soins et à la prise en charge psychologique. Les artistes amènent tout à fait autre chose. C’est pour cela que j’aime travailler sur ces projets-là. », confie Barbara.

INTERVIEW / Fanchon, de la poésie « à tire d’ailes »

Quel est l’origine de ton projet A tire d’ailes ?

Cette histoire démarre il y a quelques années. Ce projet est issu de mon double cursus comédienne-marionnettiste et art-thérapeute. Je n’ai jamais exercé en tant qu’art thérapeute mais j’ai gardé des souvenirs forts de mes passages dans les structures pendant mes stages. Et j’ai souhaité y revenir mais en tant qu’artiste.

Quand j’étais en master d’art-thérapie, j’ai conduit une recherche sur le castelet [petit théâtre de marionnettes] adaptable en milieu de soin.  Je voyais la pertinence d’aller au chevet des personnes. J’ai ensuite créé la petite forme A tire d’ailes, qui s’avère être une forme courte, en individuel, au chevet des personnes pour les publics empêchés au départ. Je voulais amener une forme artistique complète, un spectacle, en chambre.

Dès le départ, je voulais proposer une manière de s’évader. Je définis ce spectacle en « spectacle-soin », en tout cas moi c’est la dimension que j’y mets. J’ai pensé l’impact de soin au-delà du geste artistique. Et cela est dû à mon parcours de soignante.

Peux-tu nous présenter le personnage principal Linotte ?

Bien sûr ! Linotte est une fée, mère d’un univers. Elle a une grande robe brune, avec des grandes poches où elles cachent des choses. Elles se promènent toujours avec 7 portes. Elle vient ici pour passer un instant avec les patients. Derrière ses 7 portes, il y a 7 univers…

Comment te sers-tu de ces portes dans le spectacle ?

L’idée des portes m’est venue lors d’une résidence de création. Il s’agissait d’une semaine de recherche sur comment amener le spectacle en lieux fermés. Pour ce spectacle, j’installe les portes en chambre et autour du lit. Pendant la représentation, je fais la proposition d’ouvrir les portes. A chaque ouverture, nous faisons un voyage poétique dans un univers grâce à des lectures de Haïkus et du jeu. C’est précieux pour moi de pouvoir faire entendre de la poésie, et de la poésie qui me touche particulièrement.  Dans ce voyage, il y a aussi des images, de la manipulation d’objets et de lumières. Il y a aussi une marionnette et des silhouettes.

Pour te produire au chevet, tu utilises un castelet. Comment as-tu élaboré cet outil ?

Comme je disais précédemment, j’ai travaillé sur le castelet adaptable en milieu de soin pendant mes études. Mais je ne l’ai pas construit moi-même. Je ne voulais pas. J’ai convoqué Lucas Prieux pour m’aider à construire ce que j’avais dessiné : penser le chariot, le construire, réaliser les mécanismes.

Ensuite, Vincent Lengaine, ami et réalisateur-son a créé la bande son du spectacle. Je voulais vraiment offrir tous les éléments d’un spectacle jusqu’au son et les lumières.

Tout cela a été conçu sur-mesure pour s’adapter aux chambres d’hôpitaux. J’ai quand même dû m’adapter parfois car toutes les chambres n’ont pas un format standard, en EPHAD notamment. Les chambres étaient plus petites qu’à l’hôpital du coup je ne pouvais pas rentrer avec mon chariot. On a donc installé la scénographie ailleurs et ce sont les résidents et résidentes qui sont venus à moi, individuellement. Et cela a fonctionné aussi.

En milieu hospitalier, il faut savoir s’adapter comme disait Barbara Odelot, l’éducatrice avec qui tu as travaillé dans le service pédiatrie. De manière générale, que retiens-tu de ta collaboration avec le personnel ?

Alors, déjà j’étais ferme sur ma proposition : il s’agit d’une forme en chambre, au chevet. Je ne voulais pas renoncer à ça. J’ai proposé de rencontrer les équipes en amont pour leur présenter le projet.  J’ai eu le soutien précieux de la cadre. On a fait une réunion avec le Directeur et les autres cadres et ensuite on a géré par mail avec les équipes. J’ai donné en amont les dates où je venais. Je voulais des semaines entières pour être bien concentrée. Ensuite, j’ai surtout travaillé avec les éducatrices qui font le relais entre les patients, les résidents et moi. C’est tellement particulier d’intervenir en chambre. Je veux que le spectacle leur soit proposé mais absolument pas imposé. Et ce sont elles les interlocutrices identifiées au quotidien. Si besoin, s’il y a un peu de réticence, je viens en chambre pour me présenter. Souvent les animatrices ou éducatrices sont complices. Elles vont en chambre, elles ferment les volets, elles préparent la chambre à ma venue. Ce travail de collaboration avec les équipes est primordial et précieux.

De la « danse tout terrain » avec la compagnie Frichti Concept 

By | 2022/2023

Mardi 20 juin 2023, la compagnie Frichti Concept intervenait dans les EHPADs Saint-Vincent de Paul à Nogent-sur-Oise (60) et Les Marais à Margny-lès-Compiègne (60) pour une journée de virgules chorégraphiques dans le cadre du dispositif Plaines Santé.

Il est 10h00 passées quand Brendan Le Delliou, danseur et chorégraphe, et Virgine Avot, danseuse, membres de la compagnie Frichti arrivent dans le hall de l’EHPAD Saint-Vincent de Paul à Nogent-sur-Oise. L’impromptu artistique va bientôt commencer. Les artistes ont quelques minutes pour se changer et boire un café avant de rejoindre une première salle au rez-de-chaussée de l’établissement où des habitantes et habitants finissent de prendre leur petit déjeuner dans le calme. Les artistes déambulent entre les tables et les chaises sous le regard parfois médusé des habitants. Ensuite, rendez-vous à l’étage, où un autre groupe de résidentes les attendent. Là, la magie opère rapidement quand une des résidentes se lèvent pour rejoindre Virginie et danser avec elle !

Après ce grand moment d’émotions, la compagnie reprend la route direction la maison de retraite Les Marais à Margny-lès-Compiègne. Là encore, quelques résidents se lèvent pour danser…

Trouver refuge … avec le Collectif Errances

By | 2022/2023

Le Collectif Errances a posé ses valises le temps d’une semaine à la clinique Lautréamont à Loos (59) à côté de Lille dans le cadre du dispositif Plaines Santé. Lectures musicales et ateliers d’écritures créatives ont rythmé la semaine, jusqu’au vendredi où le collectif a présenté sa dernière création, Peupl.é.e.s, une « lecture musique sur puzzle-paysage ».

« Cela fait longtemps que je n’ai pas joué aussi tôt », lance Mélody Blocquel, metteuse en scène et interprète, fondatrice du collectif Errances. Assise sur le puzzle installé au milieu de la pièce, Mélody s’étire. Sarah Baraka, interprète, et Thomas Jankowski, musicien, patientent également, l’air détendu et concentré. Au fond de la salle, Madeline Wood, la scénographe est assise. C’est elle qui a réalisé le puzzle géant sur lequel vont déambuler les artistes. Les spectateurs et spectatrices seront invitées à s’asseoir sur les parties recouvertes de moquette, au sein même de l’installation. C’est une invitation à la balade, une immersion dans un paysage imaginaire, ou réel, au gré des envies et de la réception de chacun et chacune.

Les jours précédents, les artistes ont proposé des ateliers d’écriture autour de la thématique. « C’était très agréable », explique Patricia, une des participantes. Ecoutez-là :

Patricia explique ce qu’elle a fait durant les ateliers d’écriture

« Ce que j’aime, ce sont les débuts de marche … »

Il est 10h passées, la porte de la salle s’ouvre. Les trois artistes prennent place au milieu du puzzle pendant que les jeunes spectateurs et spectatrices s’installent tout autour. Thomas gratte les premières notes sur sa guitare. Mélody est assise, Sarah allongée, ses yeux ouverts regardent le plafond. La balade peut commencer, rythmée par les mots du texte écrit par Mélody. Les trois interprètes nous emmènent dans un lieu tenu secret, un chemin de bord de mer bordé de tamaris, avec vue sur une île. Libre à nous d’imaginer notre propre lieu refuge.

Patricia, spectatrice, nous partage ses ressentis après le spectacle

L’auditoire écoute, les visages sont détendus. Le puzzle retourné laisse apparaître des couleurs et des formes abstraites, douces et poétiques. Les personnes présentes ont accepté l’invitation : chacun et chacune semble revenir d’une promenade intérieure.

 

INTERVIEWS CROISÉES : LES ARTISTES, Mélody Blocquel, Sarah Baraka, Thomas Jankowski

Quels sont vos ressentis juste après la performance ? Comment avez-vous vécu le moment ?

Mélody : Je dirais que cela m’a aidé de voir des têtes connues. Nous avions rencontré ces personnes durant la semaine : nous avons partagé un ou plusieurs ateliers, nous les avons croisés dans les couloirs, on a partagé un repas. Je pense que cela a porté le spectacle. 

Sarah : Je suis d’accord. Voir des visages connus ; avoir traversé des choses avec certaines personnes, cela m’a aidé aussi. C’était comme avoir déjà un endroit commun. J’ai senti néanmoins que je mettais beaucoup d’énergie pour provoquer des réactions (rires). 

Mélody : Le spectacle était prévu à la fin d’une semaine d’ateliers et de rencontres avec les patients et patientes. Lundi j’ai joué un autre spectacle, puis nous avons fait une lecture musicale de Peuplées. À ce moment-là, on ne les connaissait pas. J’ai senti une différence. Ensuite, lors des ateliers, nous donnions et nous recevions aussi beaucoup. C’était un partage. Alors qu’aujourd’hui, c’était nous qui donnions quelque chose. Mais c’était très émouvant de leur partager ce qu’on leur a raconté cette semaine.

Sarah : Il y avait quelque chose de familier. Je me sentais plus à l’aise en fin de semaine. Lundi, on débarquait, on arrivait de l’extérieur, et on devait prendre place.     Là, nous étions davantage posés.

Était-ce la première fois que le Collectif Errances intervenait en milieu hospitalier ?

Mélody : C’est tout récent. On a eu un premier projet il y a 2 semaines à l’EPSM de l’agglomération lilloise, à côté de Lille. Mais un projet comme celui-ci avec autant de rencontres, c’était la première fois, pour moi, et pour le Collectif Errances.

Qu’est-ce que vous êtes venus chercher dans le cadre du dispositif Plaines Santé ?

Mélody : Le projet Peuplé.e.s a été pensé pour les lieux non dédiés au spectacle vivant. L’idée est d’aller vers les publics, de parler d’un lieu dans un autre lieu et pas dans une boîte noire de salle de spectacle. Dans le cadre de Plaines Santé, nous ne voulions pas uniquement proposer un spectacle mais nous souhaitions y aller petit à petit : partager du texte, de la musique, rendre accessible l’écriture poétique à travers les ateliers. Je voulais que les jeunes aillent chercher dans leurs imaginaires. Nous nous sommes vite rendus compte que ces jeunes avaient l’habitude de passer par l’écriture pour s’exprimer. Il n’y avait pas de blocages sur l’écrit alors nous sommes allés jusqu’au travail de l’oralité. Nous voulions croiser les voix, créer quelque chose de commun.

Thomas : Personnellement, je viens chercher du partage avant tout. Cela peut passer par l’énergie, de la musique, de l’attention. J’ai ressenti beaucoup d’attention cette semaine, une belle attention.

Est-ce que le spectacle a été écrit avec l’objectif de parler à des jeunes hospitalisés, en situation de soin ?

Mélody : Non. J’avais à l’origine l’envie de partager mon expérience, d’être dans un récit optimiste et vivant. Mais il est vrai que plus on avançait dans la création et plus on se disait que cela faisait vraiment sens de venir ici. Et puis en étant ici, on s’est rendu compte que c’était évident, que ça faisait écho aux jeunes. On en a parlé avec certains mercredi, il y a eu beaucoup de textes de leur part sur des souvenirs de vacances. Pour eux, l’enfance n’est pas très loin : le lieu de vacances est souvent un endroit agréable, qui leur fait du bien. 

INTERVIEWS CROISEES : LES SOIGNANTES, Anne et Emilia, infirmières en hôpital de jour

Pouvez-vous présenter brièvement la structure ?

Emilia : On accueille des jeunes de 13 à 25 ans quelques jours dans la semaine en hôpital de jour. Durant les journées où les jeunes sont là, on leur propose des ateliers animés par des intervenants professionnels. 

Quels sont vos ressentis juste après avoir assisté à la représentation du Collectif Errances ?

Anne : Une vraie découverte pour moi ! Je ne savais pas ce qu’était un spectacle vivant. J’étais très étonnée par l’aspect immersif. Il m’a fallu un temps d’adaptation  et après j’ai lâché prise et je me suis laissée aller. On a l’habitude des salles de spectacle où on est dans le noir, or là on était autant dans la lumière que les artistes.       Il et elles nous ont inclus dans leur spectacle et il m’a fallu accepter de prendre place… de trouver ma place.

Emilia : Pour ma part j’ai fait plusieurs ateliers avec elles durant la semaine et j’ai compris le lien entre les activités d’écriture et le spectacle. Quand j’ai entendu les phrases qu’on avait utilisées dans les ateliers, j’ai compris. C’était intéressant d’être inclus dans le spectacle.

D’un point de vue de soignante, en quoi ce genre de dispositifs est intéressant pour les jeunes que vous accueillez ?

Emilia : La découverte de l’inconnu, et qu’ils puissent profiter de nouvelles expériences !

Anne : Cela les invite à s’ouvrir, à s’éveiller, à se laisser surprendre. On a eu des retours très positifs.

Est-ce que c’est la première fois que la structure accueille des artistes sur une semaine ?

Emilia : Il y a quelques années, nous avions accueilli une compagnie de clowns sur une semaine également.

Vous avez assisté au spectacle comme les patients, est-ce que le fait d’être tous et toutes spectatrices et spectateurs, à égalité entre patients et soignants est quelque chose de nouveau pour vous ?

Anne : Lors des activités, les patients et les soignants sont toujours positionnés de la même manière. On vit l’expérience avec eux, avec elles, à égalité. Ce n’est pas nouveau. C’était naturel. 

Dans Peuplé.e.s, il y a plein de mots issus du champ lexical du soin : « se réparer », « renaître », « respirer », « souffler ». Avez-vous pensé que le texte était plutôt approprié au public ?

Oui, les retours sont positifs. Les jeunes nous ont dit qu’ils auraient bien aimé connaître le thème au départ, mais finalement, au fur et à mesure du spectacle, ils ont constitué leur propre monde. Et c’est ce qui s’est produit sur moi aujourd’hui : j’ai lâché prise et cela m’a apaisé. Et je me demande si cela leur a fait la même chose,    un apaisement vis-à-vis de leurs problématiques.

Emilia : Oui, j’ai vu des visages qui se sont détendus au fur et à mesure du spectacle. Je pense que la proposition les a détendus. Je pense que l’on pourra s’inspirer de cette expérience pour proposer de nouvelles choses dans le futur à nos patients. 

Le temps des cerises à l’EHPAD Le Château d’Antilly

By | 2022/2023

Lundi 19 juin 2023, la compagnie audomaroise Les Lunaisiens se produisait pour la troisième fois à l’EHPAD du Château à Antilly (02) dans le cadre de ses impromptus pour Plaines Santé. 

La bâtisse en impose dès le portail d’entrée. L’EHPAD Le Château porte bien son nom, situé à Antilly, l’établissement accueille 80 résidents et résidentes, une équipe de 40 soignants et deux chiens. À l’étage, sur les tables de l’espace cuisine, deux habitants parcourent un album photo : « Vous connaissez la Dordogne ? », demande Michel en désignant les images proprement plastifiées dans son album. Il s’agit de photographies d’un château, encore un …

Le ton est donné. Une heure plus tard, Arnaud Marzorati et Mélanie Flahaut de la compagnie Les Lunaisiens entament une chanson qui chante les louanges d’Henri IV. Ce jour-là, les deux artistes proposent la (re)découverte d’un répertoire ancien, baroque, avec des chants et musiques de la Renaissance. A chaque impromptu proposé, c’est le même rituel : Arnaud Marzorati, directeur artistique de la compagnie et chanteur, vient accompagné d’un musicien ou d’une musicienne qui présente un instrument à l’auditoire, qui plus est un instrument peu connu… Mélanie Flahaut est venue avec son basson, un instrument de la famille des hautbois. « Un tuyau de 2 mètres où l’on souffle dedans à travers une hanche », explique l’instrumentiste. Après quelques mots sur l’histoire de l’instrument, la musicienne déambule dans la salle en jouant une mélodie.

 
 
 

Le Basson :

Le basson raisonne dans la salle polyvalente de l’établissement. Les spectateurs et spectatrices écoutent attentivement. Certains ferment les yeux pour mieux écouter, d’autres dorment. Une personne agite ses bras doucement au-dessus de ses genoux au rythme de la mélodie. Il s’appelle Raymond : « Moi je suis un fan de musique. Le soir, je regarde l’émission de Nagui à la télé et je danse. C’est vrai que je préfère les musiques un peu plus costauds, le rock par exemple, mais il y a plein de musiques, comme le classique ou ce qu’on vient d’écouter, qu’on a mis de côté et ça fait du bien de les réécouter. C’est magnifique ! Je me suis régalé. Je suis heureux. »

Paulette, assise à quelques chaises de lui, est musicienne également. Elle l’a fait savoir dès la première visite des artistes de la compagnie. Quand Mélanie sort son instrument, elle ne laisse pas le temps aux autres spectateurs de deviner : « C’est un basson ! », répond-t-elle. 

« À 5 ans, on m’a fait apprendre le violon, se remémore-t-elle à la fin de la performance. Et chemin faisant, ça m’a plus et j’en ai fait jusqu’à l’âge de 25 ans. Mes violons m’ont suivi partout : je les ai amenés jusqu’ici dans ma chambre. Quand j’entends du violon, j’ai mon petit cœur qui se serre. » À chaque visite son instrument : viole de gambe, basson, accordéon, violon, au total une dizaine de musiciens et musiciennes viendront visiter les habitants de l’EHPAD du Château. « Et toujours la voix, précise Arnaud, car je ne suis que chanteur ! ». Pour l’artiste, chaque instrument donne l’occasion de présenter un répertoire différent : « des chansons qu’ils connaissent et d’autres qu’ils connaissent moins ». Cet après-midi-là, Arnaud et Mélanie entament Le Temps des Cerises. Dans la salle, des voix s’élèvent pour les accompagner. Certains yeux se mouillent aussi, la chanson réveille des souvenirs, ou la voix d’un être cher disparu. C’est cela aussi la musique : des décibels d’émotion, des gammes de joie et quelques notes de tristesse. 

 
 
 

Le temps des cerises :

La Malagua fait danser les mots et les corps à l’EPHAD

By | 2022/2023 | No Comments

Mercredi 21 juin 2023, la compagnie La Malagua a passé une journée aux côtés des résidents de l’EPHAD Alphonse Daudet dans le quartier de Moulins à Lille (59). Entre rencontres chantées, partage de souvenirs et mise en mouvements, la journée fut riche d’émotions.

Scheherazade Zambrano et Alejandro Russo interviennent dans les EPHADS lillois dans le cadre du dispositif Plaines Santé. Ce jour-là, les deux danseur.se.s investissent la résidence Alphonse Daudet, dans le quartier de Moulins. La structure accueille une trentaine de résident.e.s. Durant la matinée, les deux artistes en rencontrent quelqu’un.e.s. Ensemble, ils et elles chantent et se remémorent des souvenirs. Après le déjeuner, les participant.e.s de la matinée attendent avec fidélité leurs compagnons d’un jour dans la salle polyvalente.

Pendant ce temps, à l’étage, Alejandro s’occupe du montage son : il crée une composition à partir des paroles recueillies et des chansons choisies par les habitant.e.s. Scheherazade s’échauffe. Ensemble, il et elle créent une chorégraphie inspirée de tous les éléments de la rencontre.

Vers 15h00, le public s’impatiente. Les deux chorégraphes les rejoignent. Scheherazade initie un échauffement collectif de la voix. Puis, Alejandro déclenche la musique. C’est parti pour un cadeau chorégraphique d’une dizaine de minutes.

A l’EPSMD de l’Aisne, on chante et on danse des poèmes.

By | 2022/2023

Lundi 24 juillet 2023, nous avons suivi la compagnie N/KG – Gravitas Artis à l’Établissement Public de Santé Mentale Départemental (EPSMD) de l’Aisne situé à Prémontré. Emily Regen, danseuse, chorégraphe et fondatrice de la compagnie, accompagnée d’Elodie et Stéphane, danseuse et danseur, ont proposé un moment tout en douceur et poésie aux patientes et patients du service de psycho-gériatrie. 

« Il chante et danse des poèmes » murmure Emily en tenant une cocotte en papier dans ses mains, regard vers le public.  Elodie allume la musique et commence à marcher tranquillement au loin. Stéphane est debout, dos aux vitres. Emily attrape la cocotte. Un étrange duo commence avec la danseuse et sa grue de papier.

Pendant une heure, les trois danseurs se meuvent tout en délicatesse et avec poésie sous le regard médusé des patientes et patients. « Moi. J’adore la danse. La danse c’est ma vie. Je suis acteur de cinéma, réagit Roger, 84 ans. Ce que vous avez fait là, c’est digne d’une scène parisienne. »

Souvent, la magie opère là où on ne l’attend pas : un patient termine le poème à haute voix, une dame se lève pour aller danser avec les artistes. L’espace est ouvert : le public est libre d’y entrer, d’interagir, de participer.

INTERVIEW, Emily Regen, chorégraphe et créatrice de la compagnie N/KG – Gravitas Artis

Emily, peux-tu présenter la compagnie ?

La compagnie s’appelle N/KG – Gravitas Artis. N/KG est le symbole universel de la Gravité terrestre. Je l’ai appelée comme cela car nous travaillons sur le poids des choses. C’est la thématique du projet. J’aime trouver des points de connexion entre la danse et le soin. Je suis chorégraphe, mais je pratique aussi le soin énergétique à côté. C’est important pour moi de lier les deux.

Pourquoi avez-vous postulé à Plaines Santé ?

Je cherchais des appels à projets qui s’inscrivaient dans des lieux de soins, ou des lieux avec un public empêché. Je crois qu’aujourd’hui on ne peut plus se limiter aux théâtres. Il y a quelque chose à creuser en tant qu’artiste, aller plus au contact des gens. Je voulais vraiment inscrire le travail de la compagnie, créé il y a un an pour cela, au sein des hôpitaux. Alors quand j’ai lu l’appel à projets de Plaines Santé, j’ai aimé. J’ai aussi découvert la profusion d’artistes qui y participait et je me suis dit que j’aimerais y inclure mon travail.

Est-ce que tu continues de créer pour les lieux dédiés (théâtre, etc.) ou est-ce que tu ne produis plus que des pièces pour les lieux de soin ?

Il est vrai qu’avec la Cie N/KG je cible plutôt les lieux de soin mais j’aime aussi l’idée de continuer à produire des pièces pour les théâtres. On peut par exemple adapter au théâtre une pièce créée pour le milieu hospitalier. On peut essayer de toucher tout le monde avec une pièce autour des gestes du soin. Je pense que l’on peut s’adapter à plusieurs lieux, ou combiner les deux.

Qu’avez-vous proposé pour Plaines Santé 2023 ?

La pièce s’appelle Souffle Monde. C’est un spectacle complet qui dure une heure mais qui est découpé en petits tableaux. La pièce est racontée par un oiseau qui prend la forme d’une cocotte en papier et qui se promène à travers des poèmes. Il y a de l’écoute, du contact, de la danse contemporaine, du poids et des déséquilibres. Il y a aussi un peu de contact avec le public à travers les regards, des jeux avec des ballons de baudruche. Du contact aussi par le simple fait que nous soyons souvent dans des lieux très petits, et des lieux qui leur sont personnels, intimes. Cela nous demande de prendre un temps à chaque fois pour nous installer, pour prendre place, nous adapter.

Justement, est-ce difficile de prendre place ? Comment procédez-vous ?

Nous créons une sorte de petit bord plateau avec des chaises. On laisse néanmoins la possibilité aux personnes de circuler. Il n’y a pas d’obligation de regarder. Ils et elles peuvent aussi prendre la parole. Il y a un monsieur par exemple qui a terminé le poème que j’étais en train de dire. Il le connaissait ! Il l’a prononcé avec une telle lumière dans ses yeux : c’était magnifique. Après le spectacle, nous organisons toujours un temps d’échanges avec le public afin qu’ils et elles puissent nous partager leurs émotions, leurs ressentis.

Pour le moment, quels sont tes ressentis vis-à-vis de la réception de la pièce ?

Il y a beaucoup de personnes qui aiment la danse où qui dansaient avant. Elles nous racontent qu’elles aimaient danser le rock, ou qu’elles ont appris la danse classique. Pour le moment, nous sommes intervenus deux demi-journées en psychogériatrie avec des personnes qui ne peuvent pas beaucoup bouger. Mais, hier, une dame est venue rejoindre les danseurs. C’était très émouvant. C’était un moment du spectacle où le danseur [Stéphane] est assis sur une chaise et il est triste. Alors, nous venons le consoler en lui mettant des fleurs dans les cheveux, et là, une dame s’est levée et a voulu consoler le danseur à son tour. Elle l’a coiffé. Elle faisait partie de la pièce. C’était magique. Pour la suite, nous irons dans des services où les personnes sont plus mobiles et nous avons prévu des temps d’ateliers autour de pliages d’origamis. J’ai commencé à plier plein d’autres oiseaux pour avoir des objets transitionnels, qui permettent de créer un contact avec les personnes, de leur rappeler des souvenirs d’enfance. Nous sommes tous et toutes touchées par les cocottes en papier. Je me suis inspirée d’un conte japonais, la légende des mille grues, qui raconte que si l’on plie mille grues en papier dans une année, on peut voir son vœu de santé s’exaucer.

«C’est vraiment la rencontre de deux mondes»

By | 2021/2022

Vendredi 2 décembre 2022, l’Ensemble Contraste a rendez-vous à l’EPSM de la Somme, à Amiens, pour deux derniers concerts. L’ensemble conclue ainsi sa deuxième participation au dispositif Plaines Santé. Pour cette deuxième saison, les musiciens se sont rendus à plusieurs reprises dans les différentes unités de l’EPSM afin d’animer des ateliers et des concerts. L’occasion pour Plaines Santé d’interroger Marie Vincent, responsable des affaires culturelles et de la communication à l’EPSM de la Somme.

  • Pouvez-vous présenter l’établissement ?

L’Etablissement Public de Santé Mentale (EPSM) de la Somme est composé de 4 pôles : la psychiatrie générale ; la filière de réhabilitation psycho-sociale ; la pédopsychiatrie et la psycho-pharmaceutique. Ces 4 pôles sont répartis sur 40 hectares et plusieurs antennes à Amiens et ses alentours.

  • Quelles politiques culturelles mettez-vous en place au sein de l’EPSM ?

Je suis arrivée en 2019, or il y a avait déjà une politique culturelle bien installée et facilitée par les politiques Culture Santé de la DRAC et de l’ARS. Ces politiques ne sont plus reconduites depuis 2020 mais cela ne nous a pas empêché de continuer à faire des projets. Cela nous a fait prendre un autre virage : avant 2020, nous travaillions avec les artistes en amont, nous montions un projet avec eux, et on obtenait ou non un financement. Désormais, la DRAC fait toujours des appels à projet mais cette fois, en nous proposant des artistes. C’est le cas avec le dispositif Plaines Santé par exemple, et c’est ainsi que nous avons été amené à travailler avec l’Ensemble Contraste. Avec du recul, je trouve que cela nous a permis de sortir de notre zone de confort et de découvrir de nouveaux artistes.

Parallèlement, nous développons une politique de partenariats sur le territoire grâce à notre commission culture. La commission se réunit 4 fois par an. Elle est ouverte à tout le monde dans l’établissement. C’est un lieu de libre expression ou chacun y emmène ses envies. Nos partenaires culturels sont invités, ainsi que ceux avec qui nous n’avons pas encore de convention mais avec qui nous avons envie de collaborer. Ces réunions sont des espaces de rencontres, d’échanges et amènent à la mise en place de projets. Nous ne nous fixons aucune limite et jamais la Direction ne refuse nos propositions.

  • Quel est selon-vous l’objectif principal des partenariats ?

Notre objectif est de ramener la culture dans nos locaux, mais surtout, d’aller à l’extérieur avec les patients patientes. Les deux sont essentiels car nos patients ne seront pas toujours hospitalisés, ce sont des gens comme tout le monde, et une fois revenus à la vie « normale », ils et elles pourront continuer de fréquenter ces lieux. Nos partenaires sont très réactifs et en demande. Nous avons un tarif préférentiel mais il est important pour nous que les patients contribuent financièrement car la culture n’est pas gratuite.

  • Comment trouvez-vous de nouveaux partenariats ?

Nous travaillons avec déjà beaucoup de partenaires (la Comédie de Picardie, le Safran, le Musée de Picardie, le FRAC, etc). Nous essayons aussi de délocaliser nos commissions culture. Hier par exemple, nous étions au Zoo d’Amiens pour l’une de nos commissions et nous sommes en train de développer un partenariat avec l’établissement. En février, nous serons accueillis par le FRAC Picardie pour la première commission culture de 2023. Je reste persuadée que c’est le relationnel qui fait avancer les choses.

  • Qu’est ce que vous aimeriez améliorer ?

Nous aimerions accueillir quelqu’un en résidence mais nous n’avons pas les fonds pour le moment. Ensuite, nous observons que par habitude et par manque de temps, la culture est un peu moins ancrée en intra-hospitalier. Nous aimerions pouvoir la développer davantage. Mais j’ai bon espoir car des soignants qui travaillent en intra-hospitalier viennent de rejoindre la commission culture.

  • Pourquoi, selon-vous, est-il nécessaire de faire entrer la culture dans le milieu hospitalier ?

Pour moi, ce sont des moments magiques. On oublie la maladie, la pathologie. Il n’y a plus de différences entre patients et soignants. Les patients et patientes ne sont pas différents de nous, alors tout comme nous, cela permet de passer un bon moment, de se détendre et de se changer les idées.

  • Pour ce premier Plaines Santé dans l’établissement, comment avez-vous travaillé ?

Nous avons tout d’abord candidaté à l’appel à projet. Quand nous avons su que nous étions sélectionnés, nous avons choisi 3 représentants à la Commission Culture. Ces trois représentants ont choisi l’ensemble Contraste.

Ensuite, nous avons rencontré les artistes avec le Bureau d’Inspiration Partagée (BIP). Les choses étaient encore assez floues à l’issue de la première réunion mais on s’est dit qu’un premier concert serait bienvenu pour commencer. Il a eu lieu le 16 mai 2022. Il y a eu pas mal d’inscrits sur cette date. C’était magique : les patients nous ont remercié et les services frileux ont été convaincus et ont voulu en être.

À chaque venue des artistes, 3 services profitaient de leur présence et les musiciens se sont baladés dans toutes les unités. Nous voulions clôturer cette belle collaboration par un concert, qui a donc eu lieu aujourd’hui, le 2 décembre.

  • Quel est selon vous le point fort d’un dispositif comme Plaines Santé ?

Cela a le gros avantage de nous obliger à aller vers quelque chose de nouveau. Les soignants peuvent avoir l’habitude de travailler avec les mêmes artistes parce qu’ils ont peur d’aller vers des ateliers ou des rencontres qu’ils n’ont pas préparés. Alors oui au départ cela créé des appréhensions, mais au final, la majorité des unités étaient très satisfaites. Pour les musiciens aussi c’est beaucoup d’émotions. Ils m’ont confié être admiratifs du travail des équipes. C’est vraiment la rencontre de deux mondes !

  • Quel est votre prochain projet ou celui en cours ?

Nous avons un projet d’exposition photo sur les murs d’enceinte de l’EPSM. Cette exposition est le fruit de notre collaboration avec l’ESAD d’Amiens qui a réalisé un projet photo au sein de nos services. Nous voulons montrer sur nos murs ce qui se passe à l’intérieur. L’inauguration est prévue en mars 2023 !

Des impromptus autour de la création EINE WINTERREISE du collectif Meute

By | 2021/2022

Le collectif Meute participe pour la seconde année consécutive au dispositif Plaines Santé. Cette année, les artistes proposent un ensemble d’impromptus sous forme d’ateliers participatifs et de concerts à l’EPSM de l’Oise.

« Quoi ma gueule ? qu’est-ce qu’elle a ma gueule ? », fredonne Cédric Van Caillie, accompagné par sa guitare électrique. L’auditoire est silencieux, attentif, bercé par la musique. Le hall est cotonneux, lumineux, reposant. De confortables chaises grises et vertes accompagnent les spectateurs et spectatrices dans leur détente. « Ba alors, vous ne chantez pas ! Personne ne chante !? », s’exclame Pascale, une patiente venue assister au concert. Et elle chantonne avec Cédric, voix grave, mélodique et rocailleuse.

Pascale est mélomane : « Je me lève avec la musique, je me couche avec la musique, ça me détend. Alors oui, j’ai aimé, c’était très bien, j’ai chanté, témoignera-t-elle à la fin du concert. Avec la musique, j’entends ce que je veux entendre. »

Le concert continue. « Ne vous déplaise en dansant la javanaise … ». Cette fois Pascale a eu raison de l’auditoire, les patients et les soignants fredonnent. Le hall est décoré, une note de musique scintille, suspendue à la branche du sapin de Noël. Les fenêtres rectangulaires, juste en dessous du plafond, laissent entrer de grands morceaux de soleil sur les murs beiges. « Oh c’est beau ! », s’exclame Pascale, quand Cédric entame une de ses compositions personnelles.

« Car il reste du temps pour regonfler nos voiles » chante le musicien, comme un murmure rassurant, un souffle qui apaise.

« Le dispositif est facilement réalisable pour les équipes car il demande peu de logistique »

« Nous avons choisi ce hall car c’est l’endroit où les 4 unités peuvent se regrouper, c’est un lieu propice à la réunion », expliquent Sandrine Roekens et Johanna Triaire, coordinatrices culturelles à l’EPSM de l’Oise. L’établissement a souhaité reconduire le dispositif Plaines Santé une seconde année car les impromptus de la saison une ont fait l’unanimité. (Il s’agissait du duo de musiciens formé par Sandra Nkake et Ji dru). « Ce sont toujours des moments légers pour les patients », souligne Johanna Triaire. « Le dispositif est facilement réalisable pour les équipes car il demande peu de logistique, et est donc facilement adaptable aux contraintes de soins des unités, explique Sandrine Roekens, et puis humainement, ce sont toujours de belles rencontres ».

Cette année, le collectif Meute a impulsé une nouveauté : animer des ateliers du lundi au jeudi, soit 4 jours consécutifs. « Au départ les équipes soignantes étaient réticentes » avouent Sandrine. Sarah Thery , chanteuse lyrique du collectif Meute explique : « On voulait faire participer les patients à la création de notre nouveau spectacle, une œuvre de Schubert intitulé EINE WINTERREISE, qui raconte l’histoire de quelqu’un qui marche dans la neige ». Le texte est trop lourd pour travailler directement dessus, alors les artistes ont proposé de créer des cartes postales sonores sur la thématique des « souvenirs de printemps ». Les participants et participantes étaient invités à raconter un lieu qu’ils et elles aimaient.

Les services ont finalement tous apprécié cette série d’ateliers. « C’était important de se dire que c’est possible, renchérit Sandrine Roekens. Cela a permis aux patients des 4 unités du CPHT (Centre Psychothérapique Henri Theillou) de se rencontrer car d’habitude ils n’ont aucun lieu pour se réunir hormis la cafétaria ».

Une expérience riche et complexe pour les artistes. « C’était important pour nous de travailler sur le temps long avec les groupes de patients, raconte Sarah Thery, mais on a compris qu’un processus de création était plus difficile à mettre en place qu’un processus de diffusion. Ce serait peut-être plus adapté au format résidence. ». Quoi qu’il en soit, les équipes et les patients étaient « hyperheureux » à la fin. « Et puis c’est vraiment important qu’il y ait des artistes dans les lieux de soin car les gens ne peuvent pas sortir, alors c’est vital pour eux de continuer à avoir accès à la culture », conclue Sarah. Le temps est venu pour les artistes d’aller déjeuner, avant d’entamer un nouvel après-midi d’atelier.

Un avant-goût de Noël dans les couloirs du CH de Maubeuge

By | 2021/2022

Jeudi 8 décembre 2022, le Chœur de Chambre Septentrion a livré 3 impromptus musicaux au CH de Maubeuge. Ces courtes formes viennent conclure l’ensemble des concerts, ateliers voix et ateliers d’écriture instaurés par le collectif dans le cadre de Plaines Santé.

« Juste avant Noël, ça fait du bien, lance une patiente du service psychiatrie du CH de Maubeuge. D’habitude, on est angoissé quand on rentre ici, et là, pour une fois, c’était agréable. » Les six chanteur.ses lyriques du Chœur de Chambre Septentrion ont été chaleureusement applaudis, quittent le hall de l’hôpital, là où ils viennent de chanter un répertoire de Noël aux sonorités lyriques. « C’était comme ça, réagit une jeune patiente, le pouce en l’air. J’aimerais beaucoup avoir la même voix, c’est impressionnant ! ». Une dame au pull bleu a gardé un sourire apaisé sur le visage alors que le concert est terminé. Christophe, patient lui aussi, ancien technicien polyvalent à la scène nationale Le Manège se remet de sa prestation avec joie. Entre deux chansons, Christophe a lu une partie des textes écrits par les patients et patientes lors de deux ateliers d’écriture animés par la comédienne Alexia Leu. Le duo improvisé a coloré le concert d’une touche de poésie.  « On a créé des textes sur les souvenirs, moi j’ai écrit sur les voyages et les mineurs de fond et j’ai accepté de les lire aujourd’hui car j’adore la narration, j’adore parler et raconter des histoires », s’enthousiasme Christophe.

Le Chœur de Chambre Septentrion est intervenu de juin à décembre, en proposant diverses formes et impromptus artistiques : concerts au chevet, ateliers voix, ateliers d’écriture. Pour ces derniers, le collectif a travaillé avec la comédienne Alexia.

Des impromptus pour le plaisir des patients et des soignants

Au fond du hall aménagé en salle de concert improvisée, deux soignantes profitent du concert. «  Les patients étaient très contents de venir voir le concert et de retrouver Alexia car ils ont très apprécié les ateliers d’écriture, explique l’une d’entre elle. Nous n’avons pas l’habitude de faire venir des artistes, faute de budget, alors du coup, là, on en profite ! »

Et c’est justement le personnel soignant qui était au rendez-vous le matin-même dans les couloirs des services de chirurgie et de gériatrie. Pendant une vingtaine de minutes, les artistes ont proposé un répertoire lyrique tonitruant dans les halls d’accueil des deux services. Entre les chariots des plateaux repas, les civières, et les visiteurs pris par surprise en sortant de l’ascenseur, les chanteurs et chanteuses ont attiré quelques soignants, d’abord timides, adossés contre les murs des couloirs. « On s’ambiance ici », peut-on entendre s’échapper de l’accueil du service chirurgie. Estelle, secrétaire médicale, confie à la fin du concert : « C’est vraiment sympa, et c’est la première fois que je vois ça ici. Dommage qu’il n’y ait pas eu plus de passage dans le service. Les patients sont restés dans leur chambre, mais pour nous, on a bien aimé, ça nous a fait une pause ! ».  À l’entrée de l’unité ambulatoire adulte endoscopie, une médecin a écouté tout le répertoire avec attention. « Cela me rappelle mon enfance car je viens de Roumanie et là-bas, nous avons souvent de la musique dans les rues, dans les hôpitaux aussi. », confie-t-elle avant de disparaitre dans le couloir.

Le programme de la journée est chargé avec 4 représentations. À la cafétaria du CHU, entre deux bouchées, Mélinée Lesschaeve, soprano revient sur cette expérience : « C’était différent à chaque fois. On a proposé différentes formes. À chaque fois on s’adapte au public et à l’organisation. Mais pour moi, le contact le plus fort était avec les patients en psychiatrie. »

La distribution du jour au CHU de Maubeuge :

Direction : Rémi Aguirre Zubiri

Comédienne : Alexia Leu

Sopranos : Clémence Olivier, Mélinée Lesschaeve

Mezzo : Magali Aguirre Zubiri

Ténor : Benjamin Aguirre Zubiri

Baryton : Alexandre Richez

Basse : Christophe Gautier